Jusqu'à présent la "sélection" d'Halloween de cette année n'est pas terrible, j'avoue. Avec son score de zéro film recommandable, c'est surtout une sélection de films à éviter, et ça ne va pas s'arranger aujourd'hui puisque, comme tous les ans à la même période, j'ai encore expérimenté un film Full Moon Features dans l'espoir que pour une fois, ça soit réellement aussi goleri que son synopsis nanaresque cherche à le faire croire.
Cette année ce sera Evil Bong, qui date de 2006 et qui a déjà donné lieu à trois autres épisodes depuis, dont un en 3D et un crossover avec la série Gingerdead Man parce que Charles Band est du genre à presser ses citrons, même les plus pourris, jusqu'au bout. Puis à passer l'écorce et les pépins au mixeur pour être sûr de rien gâcher. C'est une histoire de pipe à eau hantée qui tue des gens et donc logiquement, ça devrait être drôle, parce que sans ça, ça n'a même pas de raison d'être, parce que personne ne fait ni ne regarde un film de pipe tueuse en pensant que ça va être un vrai bon film qui fout la trouille. Le début cherche d'ailleurs plus à ressembler à une sitcom qu'à un film d'horreur : un jeune étudiant ringard emménage en colocation avec une bande de fêtards. Ces derniers ne pensent qu'à s'amuser, fumer des joints et draguer les filles, tandis que le nouveau ne pense qu'à ses bouquins, et donc il ne manque plus que des rires enregistrés pour se croire revenu dans une série des années 80-90. L'un d'eux achète un bong maudit, qui aspire l'âme de tous ceux qui l'utilisent, et l'intello va être contraint de se décoincer et de consommer à son tour la drogue de la pipe maléfique pour aller libérer ses colocs prisonniers.
L'avènement d'Apatow et sa bande est sans doute ce qui a poussé Full Moon Features
à tenter le genre "rions un peu entre mecs cool qui aiment fumer des joints" mais le résultat
ressemble quand même plutôt à un pilote de feuilleton rejeté il y a 20 ans qu'à de la comédie moderne.
Avec un total de deux décors, un scénario de deux lignes (écrit sous pseudonyme par l'auteur de Critters), un objet inanimé dans le rôle du "monstre", on n'est clairement pas dans le dessus du panier des productions Full Moon, plutôt dans un truc bricolé à la va-vite avec les moyens du bord, en faisant improviser une série de saynètes répétitives à des acteurs au chômage. Les personnages qui tirent sur le bong font TOUS le même trip qui coûte pas cher, à savoir, aller dans une boîte de strip-tease où, en plus de femmes à poil, ils rencontrent des copains du réalisateur (Tim Thomerson, Phil Fondacaro) et des marionnettes empruntées à des films précédents (le Gingerdead Man et le "sauvage" de Doll Graveyard). C'est dans la veine de ce que le studio fait depuis une dizaine d'années : prendre une idée de base suffisamment débile pour faire rêver les amateurs de série Z, ajouter zéro créativité parce que le titre incongru suffira à vendre, et simplement bacler un peu plus d'une heure de n'importe quoi pour remplir un DVD.
Tu prends un accessoire d'un de tes vieux films, tu le combines avec un autre accessoire genre un joint,
et hop, magie ! Tu as un nouveau film sans débourser un dollar de plus !
Cela dit, curieusement on a quand même vaguement l'impression que Charles Band a fait un petit effort sur ce coup-là au lieu de rester en pilote automatique. Déjà parce que pour une fois ça n'est pas une resucée de son propre Puppet Master ni un sous-Freddy, mais un genre d'American Pie horrifique. Ensuite parce qu'il s'est donné la peine de débaucher deux "pointures" du cinéma d'horreur et du cinéma cannabisophile en guise de petit clin d'oeil au public : Bill Moseley et Tommy Chong viennent cachetonner deux minutes. Remarquez, on avait bien Sid Haig et Michael Berryman dans le minable Ghost Poker, donc ça ne prouve sans doute rien. Et puis surtout, un jour ce serait bien qu'il essaie de développer ses idées débiles en véritables histoires, et pas seulement espérer que broder autour de "imagine : un lacet de chaussure qui tue des gens !" suffise à faire rire pendant 60 à 80 minutes.
La moitié du duo comique Cheech & Chong (quasi-inconnu en France c'est vrai)
fait une brève apparition dans le rôle de l'ancien propriétaire du bong.
Alors voilà, si vous ne cherchez vraiment rien de plus qu'un film à mettre en bruit de fond d'une soirée fumette, je suppose qu'il peut faire l'affaire autant que n'importe quel autre. De toutes façons on dirait bien que Charles Band ne vise plus d'autre public que ça. Pour ceux qui ne prennent la peine de mettre un DVD dans leur lecteur que s'ils comptent regarder le film pour de vrai, en revanche, attendez-vous à une succession de gags laborieux (des filles avec des soutien-gorge carnivores, des monstres qui se branlent) assaisonnés de quelques effets spéciaux indigents, ce qui veut dire en gros que je n'ai plus qu'une semaine pour vous trouver au moins UN bon film pour Halloween, parce que ce n'est clairement pas celui-ci.