25 novembre 2009
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King Kong II s'ouvre sur la scène finale du 1er épisode : King Kong escalade une tour du World Trade Center, commet l'erreur de poser la fille qu'il a capturée, se fait mitrailler par les hélicoptères de l'armée et bascule dans le vide. La suite nous apprend que le gorille géant a survécu à sa chute de 110 étages, parce que bon, 400 mètres, c'est rien du tout. 10 ans plus tard, il est toujours dans le coma, maintenu en vie par des chercheurs d'une université d'Atlanta (menés par Linda Hamilton, qui décidément n'aura pas vraiment eu une carrière particulièrement remarquable en dehors des deux premiers Terminator) qui souhaitent lui greffer un coeur artificiel high-tech. Mais il y a un problème, en dehors du fait que c'est un point de départ complètement idiot : pour l'opération, Kong a besoin d'une transfusion de plasma, et faute de trouver un autre singe géant pour fournir son sang, il est condamné.
Heureusement, c'est pile à ce moment-là qu'un aventurier en goguette à Bornéo tombe nez-à-nez avec un singe géant en liberté, car chacun sait qu'en 1986 Bornéo était encore une île sauvage peuplée d'une poignée d'indigènes en pagne armés de sarbacane, sur laquelle un singe géant pouvait parfaitement se balader tranquille sans trop se faire repérer. L'explorateur parvient à capturer la bête et à la rapporter aux Etats-Unis où il la vend à l'université d'Atlanta qui peut ainsi opérer King Kong. Le monstre est sauvé, pour la plus grande joie des chercheurs, qui ne sont pas inquiets le moins du monde au sujet des dégâts qu'il pourrait causer à nouveau après avoir ravagé New York maintenant qu'il est sur le point de sortir du coma. Manque de bol, à son réveil, Kong sent la présence de son semblable, qui n'est autre qu'une femelle, et décide de s'évader pour la retrouver et fuir avec elle... Pourchassés par l'armée, King Kong et sa meuf (ils l'appellent Lady Kong mais c'est nul, appelons-la plutôt "la meuf à King Kong) pourront-ils jamais mener une vie de couple heureuse dans la jungle georgienne ?

pour greffer un coeur de la taille d'une Twingo.
Je ne vous raconte pas tout parce que le film dure à peu près 3 ans donc ça finirait par vous soûler. Enfin officiellement il fait 1h30 seulement, mais ça paraît beaucoup plus, parce que malheureusement ça n'est pas très palpitant (le comble pour une histoire de coeur). Il faut dire que l'intrigue est vraiment tarte au possible. Même si vous arrivez à digérer le prétexte à l'existence de ce film, par la suite les invraisemblances se succèdent à flot continu. La paresse (ou incompétence) des auteurs se manifeste principalement de deux façons. D'abord, chaque fois que l'histoire amène un problème difficilement soluble, abracadabra, on passe à la scène suivante et tout est réglé par magie, sans explication. Deuxièmement, pour des bestiaux de 15 mètres de haut, Kong et sa meuf se révèlent incroyablement furtifs, puisqu'ils attaquent régulièrement par surprise des humains qui ne les entendent jamais arriver et ne s'aperçoivent de leur présence que lorsqu'ils les ont juste en face d'eux, et parviennent à vivre "cachés en plein air" pour des périodes relativement longues quand on pense que l'armée surveille les environs à pied, en jeep et en hélicoptère. Forcément, question crédibilité, ça se pose là.

sans doute que De Laurentiis ne voulait pas abimer le costume pour pouvoir
le réutiliser dans un éventuel Son of Kong...
Alors vous me rétorquerez qu'on ne regarde pas un film de monstre géant pour son scénario, mais malheureusement, même au niveau des monstres eux-mêmes, King Kong Lives se révèle assez pitoyable. Ici, pas d'animation en image par image comme dans la version des années 30 ni de créature sortie d'un jeu vidéo comme dans le remake de Peter Jackson, mais deux acteurs en costumes comme dans les Godzilla et, pour certaines scènes, une main géante articulée. Hélas, cette dernière est bien naze, et si Kong lui-même n'est pas trop atroce, sa femelle rouquine est en revanche bien ratée. Les acteurs sous les fourrures semblent ne pas réussir à se décider entre "je suis un gorille" et "je suis un humain en costume de carnaval" au niveau de leur gestuelle. Bref, ça fait super cheap et on n'y croit pas du tout. Ils interagissent principalement l'un avec l'autre et très peu avec le reste, on a du coup assez peu de scènes de destructions alors qu'ils sont très, très présents à l'écran. On a droit à quelques maquettes démolies ou quelques victimes en caoutchouc dévorées, mais la plupart du temps le réalisateur en est réduit à ajouter de l'action de manière complètement débile, comme lors de la scène de l'évasion de la meuf à King Kong où, histoire de dire qu'il se passe quelque chose d'effrayant et dramatique, on voit les humains sauter dans des bagnoles (on ne sait pas trop ce qu'elles foutaient dans le hangar-prison à la base) et foncer se crasher eux-mêmes n'importe où sans que les singes ne les attaquent.

du film, dommage que Guillermin les gaspille à faire grimacer le monstre
à des fins purement humoristiques.
Il me semble que, dans les critiques qui reviennent souvent sur le King Kong de 76, il y a le fait qu'il manque de poésie, que la relation qui unit Kong à Dwan n'est pas assez touchante. Sans doute que Guillermin a voulu corriger le tir dans ce domaine en nous montrant à quel point le gorille géant n'était pas une brute sauvage mais un coeur (artificiel) avec du poil autour et du coup, faute de briller dans les scènes d'action, il a mis le paquet sur les scènes d'amour. Et là malheureusement ça ne passe pas du tout, parce que deux couillons déguisés qui se font des papouilles et s'échangent des regards humides sur de la musique douce, ça n'est pas émouvant, c'est grotesque. C'est tellement risible que, histoire de parachever le désastre, on s'attendrait presque à entendre l'intro de Let's Get It On pour nous signifier qu'après son numéro de charme, ça y est, Kong va serrer. Et à vrai dire, je parie que la seule raison qui fait qu'on n'y a pas droit et que la production n'avait pas le budget pour se payer du Marvin Gaye sur la BO.

Ajoutons que le film est plombé par de trop nombreuses tentatives d'humour qui non seulement ne font pas rire, mais achèvent de tuer toute intensité dramatique (ne vous fiez d'ailleurs pas à l'image de la jaquette qui montre un Kong féroce : l'ambiance est plus souvent à la comédie qu'au film d'épouvante). Entre les scènes de tendresse involontairement comiques, les gags délibérés mais lourdingues et totalement malvenus, la médiocrité des effets spéciaux et la bêtise générale, King Kong II pourrait presque prétendre au titre de nanar. Si vous savez rire devant un film raté, celui-ci réserve quelques bons moments de poilade, c'est vrai. Mais honnêtement, ce n'est pas de la grande série Z. Trop souvent, c'est l'ennui qui l'emporte sur la drôlerie et en définitive, le film est plutôt vaguement pitoyable que franchement hilarant. Ca reste une petite curiosité susceptible d'amuser les amateurs du genre, mais pas une pièce indispensable à la collection d'un amateur de cinéma foireux.
