The Colony

Alors voyons, aux origines de Ciné Discount, il y a quoi d'autre ? La SF canadienne post-apocalyptique à petit budget, bien sûr. Ce coup-ci il n'y a pas de catcheur qui fait de la figuration dedans, mais Laurence Fishburne et Bill Paxton dans des rôles importants, et ça, quand même, c'est pas rien pour un film qui a coûté moins cher que le salaire moyen de Dwayne "The Rock" Johnson.

La jaquette le compare à l'adaptation ciné du Transperceneige, et pour une fois ce n'est pas complètement absurde (même si ça peut paraître un poil prétentieux), puisqu'il est ici aussi question d'un futur proche où l'humanité s'est condamnée à mort en pensant régler le problème du réchauffement climatique avec une nouvelle technologie hasardeuse, et où les rares survivants de l'apocalypse glaciaire se sont enfermés à l'abri du froid avec ce qu'il restait de provisions. La ressemblance s'arrête là, quand même, et il n'est pas question de train ni de révolte des pauvres contre les riches. Les derniers humains vivotent dans des bunkers souterrains appelés "Colonies" où la difficulté de produire de la nourriture en quantité suffisante et les tensions entre dirigeants rendent l'avenir de plus en plus incertain. La Colonie 7 reçoit un message de détresse de la Colonie 5 et envoie un petit groupe leur porter secours. Trois hommes partent affronter les déserts enneigés sans aucune idée de ce qui les attend là-bas. Sur place, ils découvrent qu'un carnage a eu lieu...

The Colony bénéficie d'un casting correct, de bons décors aussi bien en intérieur qu'en extérieur, d'effets spéciaux de qualité honorable (bien qu'un peu inégale, les explosions n'étant pas toujours convaincantes). On ne s'ennuie pas devant, et pour un réalisateur de séries télé dont le CV inclut des "oeuvres" comme Les Sables de l'enfer, un téléfilm Syfy sur des serpents géants que vous avez peut-être déjà vu en 3ème partie de soirée sur NT1 ou NRJ12 si c'est votre genre de came, Jeff Renfroe ne s'est pas trop mal acquitté de sa mission de tourner pour pas cher quelque chose qui ressemble à un "vrai" film hollywoodien. Par rapport à ce que j'ai l'habitude de chroniquer ici, on est donc plutôt dans le dessus du panier. Hélas, ça n'est pas un vrai bon film pour autant. Clairement pas nul certes, mais plutôt insipide.

Les images du monde enseveli sous la neige sont assez chouettes,
mais se payer des effets spéciaux de qualité professionnelle ne suffit pas à réussir un film.

Le film manque cruellement de personnalité, tout sent le réchauffé, c'est un flot continu de clichés resservis sans imagination. Le jeune puceau qui se porte volontaire pour une mission dangereuse pour prouver qu'il en a dans le froc et qui est le premier à se faire buter, le type qui se réveille d'un bond dans son lit après un cauchemar/flashback, le pont délabré dont un morceau se détache sous les pieds de quelqu'un qui essaie de le traverser, vous je sais pas, mais moi je commence à les avoir assez vues ces scènes-là. Les péripéties sont banales, la découverte de la mystérieuse menace qui a frappé la Colonie 5 donne finalement lieu à une révélation pas bien originale, les personnages ne sont pas très intéressants, les acteurs ne se foulent pas beaucoup. Bon, il faut dire aussi que les dialogues semblent vraiment avoir été écrits par une machine à partir d'une liste de lieux communs ; on s'étonne presque de ne pas entendre "ce plan est tellement dingue qu'il pourrait bien fonctionner !", "c'est calme... trop calme" ou "on dirait qu'on a de la compagnie". Et encore, pour cette dernière réplique, je suis même pas sûr.

Embaucher des têtes d'affiche pour donner du cachet à un "petit" film, c'est cool en théorie,
mais si c'est pour les gâcher dans des rôles sans saveur, autant simplement prendre Danny Trejo non ?

Pour ne rien arranger, l'univers du film manque un peu de substance et de crédibilité. Quelques détails tiennent debout (les survivants qui prélèvent religieusement les graines de leurs tomates, le véto qui cherche un moyen de stimuler la sexualité de ses derniers lapins), mais certains éléments plus importants paraissent plutôt tirés par les cheveux (tout malade de la grippe est condamné au bannissement ou à la mort). Quant aux méchants du film, ben, pour être plus effrayants ils se comportent comme une bête bande de monstres de film, pas comme une tribu dont le mode de vie permettrait réellement d'assurer la subsistance dans la vraie vie. Au final on est presque plus proche d'un film d'horreur un peu bête que de science-fiction.

Sur cette image ça reste gentillet, mais certaines scènes d'action très sanglantes,
et si vous espérez de l'anticipation intelligente plutôt que du gore vous serez déçus.

C'est regardable mais sans plus, et comme on ne peut pas dire que ces dernières années, avec la mode des zombies et des vampires, on a manqué d'histoires de créatures feulantes et grimaçantes qui poursuivent de pauvres gens pour les croquer, si vous frôlez déjà l'indigestion vous pouvez sans regret vous passer de celle-ci et vous tourner vers Snowpiercer. Après, ben, ça se trouve actuellement en offre "4 pour 20€" et à ce prix-là si vous êtes super fan de Laurence Fishburne et/ou fasciné par le genre post-apocalyptique ça peut valoir le coup quand même, mais sinon, faut pas se forcer.