
Moi, vous me connaissez : je suis pas le genre de bon gros fils de pute qui profiterait d'une tragédie mondiale pour relancer son petit blog avec un titre évoquant la situation actuelle pour racoler un peu. Non c'est vraiment un pur hasard si j'ai décidé de reprendre mon e-plume maintenant pour vous parler de Contamination, un film qui n'a absolument rien à voir avec les pandémies puisqu'en fait c'est une histoire d'extraterrestres pompée sur Alien. Signé Lewis Coates c'est-à-dire Luigi Cozzi, réalisateur du fameux nanar Starcrash, le film se prétend adapté du roman (fictif) L'Alieno pour ne pas risquer un procès de Ridley Scott, une méthode d'escroc qu'on lui pardonnera facilement en constatant que certes, il a volé l'idée de l'affreux monstre de l'espace dont les oeufs finissent par faire exploser ceux qui s'en approchent de trop près, mais n'a pas poussé l'arnaque jusqu'à recopier l'intrigue, radicalement différente ici. En effet, faute du budget nécessaire à un vaisseau spatial et des effets spéciaux un peu plus complexes que "on met des cascadeurs dans des combinaisons remplies de faux sang et d'abats, et on les fait éclater", l'histoire se déroule sur Terre et prend principalement la forme d'une enquête policière malgré l'élément de SF.
Une équipe est dépêchée pour intercepter un cargo qui dérive vers New York sans répondre aux appels des autorités portuaires. A bord, tout l'équipage est mort, horriblement mutilé, et l'on découvre que la cargaison de paquets de café contient en réalité d'étranges oeufs verts (oui j'ai choisi le film à cause de Pâques en vrai, je vous jure) porteurs d'une substance qui, par simple contact, empoisonne ses victimes et les transforme en geysers de tripailles en quelques secondes. Stella Holmes, une colonelle des "services de sécurité du Pentagone, 5ème division spéciale", des gens en vilain uniforme beige officiant dans des locaux qui évoquent le Star Trek original et dont les commandos interviennent en utilisant des hélicoptères de location, est dépêchée pour enquêter sur l'affaire. Après avoir tenté sans succès d'interroger les destinataires de la livraison de café, qui se sont révélés être une bande de criminels fanatiques qui projetaient selon toute vraisemblance d'empoisonner toute la ville, la colonelle remonte la piste des oeufs jusqu'à une plantation en Colombie...

Si vous aimez voir des viscères voler dans tous les sens au ralenti,
vous allez être gâtés.
L'actrice canadienne qui joue la colonelle a l'air hébétée tout au long du film, soit parce que c'est déroutant de jouer avec un casting international en sachant que tout le monde sera re-doublé en italien plus tard, soit parce qu'elle n'en revient toujours pas d'avoir signé pour jouer un personnage aussi incompétent. La meuf, on la met sur une mystérieuse affaire d'oeufs verts d'origine inconnue et il lui faut la moitié du film pour se rappeler soudain que "ah mais oui c'est vrai qu'il n'y a pas longtemps, j'ai fait radier de la NASA un astronaute qui prétendait avoir découvert des oeufs verts sur Mars alors que son coéquipier disait que c'était faux, ça doit avoir un rapport avec cette nouvelle affaire d'oeufs verts". Ensuite il lui faut tout le reste du film pour comprendre que c'est l'autre astronaute qui a ramené les oeufs en douce sur Terre avec de mauvaises intention. A son arrivée en Colombie quelqu'un tente de l'assassiner avec un des oeufs, prouvant ainsi qu'elle est repérée et qu'elle devrait être sur ses gardes, mais elle va se jeter dans la gueule du loup comme une gourdasse en décidant de visiter la plantation de café "sous couverture" comme si elle n'avait pas pigé qu'elle serait démasquée instantanément. Le recrutement à la "5ème division spéciale" du Pentagone, ça doit être du genre "ah oui, Stella... on va l'envoyer à la 5ème division, elle est pas méchante mais elle est un peu... spéciale".

Louise Marleau a beau être une actrice respectée au Québec,
le moins que l'on puisse dire c'est que la réponse de Contamination à Ellen Ripley
ne fera jamais d'ombre à son modèle.
On sent que ça n'a pas dû être facile, pour ce pauvre Luigi Cozzi, de pondre 90 minutes de film avec "refais-moi Alien mais pour pas cher, ton copain Dario Argento nous prête le groupe Goblin pour faire la musique mais le reste doit pas coûter plus cher qu'un film de cannibales, d'ailleurs je t'ai récupéré 20 kilos de dégueulasseries dans les poubelles du tripier". Alors il étire son intrigue en faisant contourner le pot-aux-roses par son héroïne aussi souvent que possible, alors qu'elle est censée être une super pro complètement focalisée sur son boulot (ses deux comparses masculins espèrent la séduire, sans succès), et il étire ses séquences en faisant durer ses stock-shots aussi longtemps qu'il peut (comme c'est intéressant de regarder un avion atterrir en Colombie ! Puis de regarder descendre les passagers !), en n'hésitant pas à insérer un peu de comédie gentiment balourde dans son thriller horrifique, et en faisant régulièrement exploser quelqu'un, ce qui perd un peu de son côté "choc" quand tout le monde meurt de la même façon tout au long du film.

Les décors de Mars sont plutôt chouettes (même s'ils imaginent la "planète rouge" couverte de glace)
mais on ne les voit que très brièvement dans le film.
Avec tout ça il faut attendre le dernier quart d'heure pour voir enfin le méchant Martien, qui semble avoir été l'inspiration pour Kang & Kodos dans Les Simpson. S'il avait remué un peu plus, ça aurait limite pu être un Craignos Monster assez chouette dans son genre, mais là c'est une espèce de gros automate qui ouvre et ferme ses bouches et tend un peu le bras, c'est pas franchement très spectaculaire sans être suffisamment nanar non plus. Je m'attendais certes pas à une créature de la classe et la personnalité du vrai Alien de HR Giger mais quand même, patienter 1h15 pour au final voir que le terrible streum qui pond tous les oeufs pour conquérir le monde est simplement planté dans son coin de décor à attendre que ses victimes viennent se faire aspirer, ça laisse un peu sur sa faim.

Voilà, je vous montre "le Cyclope" au cas où vous préférez ne pas vous farcir le film pour de vrai.
Pour un amateur de bis italien, Contamination à son petit charme, entre les effets gore, la bande originale de Goblin, le côté sympathique d'une contrefaçon bricolée par des artisans débrouillards plutôt que des charlatans cyniques. Malheureusement ça reste un film assez bébête plombé par ses longueurs, son scénario qui demande beaucoup d'indulgence au spectateur, le manque de charisme de ses acteurs... J'ai vu pire, j'ai pas détesté, mais je me suis quand même un peu ennuyé devant. C'est pas pour n'importe quel fan de SF des années 80 en quête d'un titre méconnu, c'est vraiment plutôt à réserver aux curieux à qui le "Cinéma de quartier" de Jean-Pierre Dionnet manque cruellement. Si vous vous reconnaissez là-dedans, c'est vraiment pas indispensable, mais c'est pas ignoble.
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Contamination (1980), écrit et réalisé par Lewis Coates/Luigi Cozzi (Starcrash, le choc des étoiles). Avec Louise Marleau (Belle et Sébastien), Marino Masé (Le Gendarme à New York), Ian McCulloch (L'Enfer des zombies), Gisela Hahn (La Grande débandade), Siegfried Rauch (Bons baisers d'Athènes).
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