Alors, c'était bien votre soirée films d'horreur lundi soir ? Ouais je sais, avec un conseil comme "Cabin Fever 2 c'est de la merde, n'achetez pas" je vous ai pas beaucoup aidés, mais vous pouvez quand même pas compter sur moi pour vous dicter quoi faire toute votre vie les gars, vous êtes grands maintenant. Et puis vous aviez qu'à chercher un peu dans les archives du blog aussi, y avait quelques trucs potables à piocher. Et merde à la fin, qui a dit que vous deviez absolument regarder des films d'horreur un 31 octobre hein ?
Au pire, si vous voulez fêter Halloween en retard, j'ai ce qu'il vous faut : Piranha 3D. Bon je sais, je donne pas dans l'originalité, dans le petit film obscur à 50 centimes découvert pour vous dans le bac de soldes d'une petite échoppe louche de Chinatown, vous en avez sûrement déjà entendu parler. Mais aujourd'hui c'est l'anniv du blog alors je fais ce que je veux. Et comme on m'a déjà reproché d'être trop négatif et de donner l'impression de vouloir simplement casser film après film, on soufflera cette deuxième bougie comme la première, avec un film que j'aime bien, histoire de changer des ratages et des navets.
Proche parent de la vague "grindhouse moderne" lancée par Tarantino et Rodriguez, Piranha 3D délaisse les tendances actuelles, le postmodernisme, la citation de références connues, le faux documentaire , le "j'avais pas d'idée alors j'ai mis des zombies, t'aimes ça les zombies non ?", le révisionnisme pseudo-réaliste, l'autoparodie ou l'automutilation dans la boue pour tenter de renouer avec un certain cinéma d'horreur des années 70-80, simple, crado, rigolo, qui ne lésinait ni sur le sang ni sur les nichons. Et si on le considère comme la suite de Piranha de Joe Dante et Piranha II de James Cameron, on peut même dire qu'il revient à la mini-tradition qui consistait à profiter du 3ème épisode d'une série pour passer à la 3D, comme pour Vendredi 13, Amityville ou Les Dents de la Mer, tradition aujourd'hui mise à mal par des Saw VII 3D ou Destination Finale 4 3D. Pour ne rien gâcher, il utilise la 3D pour de vrai, pas seulement pour racketter les spectateurs de 3€ supplémentaires lors de la sortie en salles en disant que "c'est pas un gadget, on veut pas l'utiliser comme tel, ce qui compte c'est d'ajouter de la profondeur de champ !"
Jerry O'Connell en producteur libidineux et cocaïnomane des "Wild Wild Girls"
est l'une des attractions du film. Ses Wild Wild Girls, Kelly Brook et Riley Steele, en sont une autre.
Le scénario est sans fioriture : près d'une petite ville d'Arizona, des piranhas préhistoriques sont libérés d'un lac souterrain et envahissent le lac principal juste au-dessus. Manque de bol, ça tombe en pleines vacances de printemps et des centaines d'étudiants en goguette sont là pour s'éclater en s'adonnant à divers jeux aquatiques (beuveries en bateau, concours de t-shirts mouillés sur plate-forme flottante, parachute ascensionnel seins nus, tout un programme). La shérif veut faire évacuer mais évidemment personne n'a envie de l'écouter, et pour ne rien arranger, son fils aîné a laissé sa petite soeur et son petit frère tout seuls pour partir en virée sur le bateau d'un producteur de vidéos coquines. Bref, il y a une grande étendue d'eau, et dedans il y a plein de gens et plein de poissons qui aiment manger les gens. Du coup, les poissons mangent des tas de gens.
Le design des bestioles est chouette, mais on regrettera leur animation
très peu naturelle, qui ne les rend pas toujours très crédibles.
Alors, si vous attendez plus que ça du film, évidemment vous allez être déçus. Il n'y a vraiment pas de 2ème couche à l'intérieur : juste "des piranhas mangent des gens dans un lac rempli de nanas en bikini". Si vous aimez le gore et les nanas en bikini, c'est très chouette, mais à part ça, c'est pas un film qui cherche à faire le malin ou un exercice de style à la Tarantino, genre "prenons un sujet de série B/Z et faisons un film d'auteur", c'est vraiment juste "des piranhas mangent des gens en maillot de bain, en 3D". Le réalisateur Alexandre Aja a eu le bon goût de ne pas essayer ni d'intellectualiser la chose ni de la tourner en dérision pour montrer qu'il valait mieux que ça : il a accepté l'idée qu'un film de piranhas en 3D méritait d'être bien fait même si "personne s'attend à du Shakespeare", et qu'il pouvait s'adresser à des gens qui ont simplement envie de se marrer devant une bonne comédie horrifique, pas forcément à des branchouillés qui veulent regarder ça au second degré ni des demeurés sans aucune exigence de qualité.
C'est un film pour amateurs de plaisirs simples,
mais pour eux (et donc moi), c'est quasiment de l'Art.
L'histoire est simple mais tient debout (tant qu'on accepte l'idée de piranhas préhistoriques s'échappant de leur grotte) et progresse à un bon rythme, sans brûler toutes ses cartouches trop vite, en ménageant des moments de suspense et en offrant quelques rebondissements. Comme il n'y a pas vraiment de grosses vedettes dans le film (les deux acteurs les plus connus ne font que de brèves apparitions), on se dit que n'importe qui est susceptible d'y passer, ce qui évite au film d'être trop prévisible. Et le tout est saupoudré par une grosse dose d'humour noir, qui est pour beaucoup dans le charme du film. Quand les piranhas entrent en action, en général le résultat est tellement atroce que ça en devient drôle. Les poissons eux-mêmes, en images de synthèse, ne sont pas toujours hyper convaincants, mais les effets gores sont réussis, et souvent aussi dégueu que drôles. Je pourrais vous raconter les meilleures scènes pour vous donner envie, mais le mieux c'est de garder l'effet de surprise. Mais vous verrez, le coup de la fille portée hors de l'eau par deux mecs, ou celle avec les cheveux coincés dans l'hélice, ça vaut son pesant de cacahuètes.
Même si l'ambiance est à la déconne, comme ici avec les implants d'une victime
libérés après sa mort, ça reste un film à déconseiller aux âmes sensibles.
L'édition DVD 3D est trouvable à 10€ (en général dans des opérations "les 2 pour 20€") et fonctionne sur les télés classiques avec les deux paires de lunettes en carton fournies dans le boîtier, et je serais donc tenté de vous conseiller de choisir celle-ci plutôt que la version de base. Le film a été conçu pour être vu en trois dimensions, et son usage pimente les nombreux gags visuels. Maintenant, pour l'avoir vu au ciné d'abord, je dois dire que c'est nettement moins bien à la télé. L'effet de relief est là, mais moins saisissant, certains passages sont flous, et les lunettes colorées plongent le tout dans une espèce de bain violet pas très joli. Le résultat est meilleur que pour Meurtres à la St-Valentin 3D, probablement parce que la majeure partie du film se passe àa la lumière du jour, mais certains finiront peut-être par jeter l'éponge en cours de visionnage et se rabattre sur le deuxième disque fourni, celui qui propose le film en 2D.
Tenez, ça c'est typiquement le genre de séquence qui était mieux au cinéma.
Malgré la déception liée à la 3D qui passe pas très bien à la télé, ça reste un bon petit film d'horreur bien marrant, dans son genre on peut peut-être même le considérer comme un nouveau "classique mineur" si j'ose dire : pas quelque chose qui marquera une génération comme Les Dents de la Mer ou même Gremlins, mais une sorte d'hybride des deux que les amateurs de blagues sanglantes se reverront avec plaisir tous les 3-4 ans. Un bon film d'animaux mangeurs d'hommes, gentiment coquin, qui tient haut la main ses modestes promesses de "sea, sex & blood". Mais que les cinéphiles les plus exigeants restent conscients que ça reste une simple histoire de méchants piranhas et rien de plus.