J'ai très peu de souvenirs de The Crow mais de ce qu'il m'en reste, c'était un truc assez tarte qui ne serait jamais sorti de l'obscurité sans la mort de son acteur principal sur le tournage. Et Dark City, chaque fois que je me suis mis devant je me suis endormi au bout de 10 minutes. Du coup, j'avais fait l'impasse sur I, Robot mais comme j'aime bien Nicolas Cage (ce qui m'a amené à m'infliger pas mal de merdes), j'ai regardé le dernier film d'Alex Proyas, Prédictions.
C'est un film catastrophe qui, dans les grandes lignes de son synopsis, ressemble exactement à pas mal de grosses productions récentes comme Le Jour d'après, Phénomènes ou 2012 : un type sait que la fin du monde arrive mais personne ne veut l'écouter et du coup la fin du monde arrive et il ne lui reste plus qu'à essayer de sauver sa famille en espérant qu'il reste un bout de monde où vivre après la fin. Ici, on suit Nicolas Cage en prof d'astrophysique dont le fils ramène à la maison une liste de chiffres rédigée par une petite fille et enterrée dans une capsule temporelle à son école 50 ans plus tôt. Le hasard l'amène à en découvrir la signification : ils correspondent aux dates et au nombre de victimes de tous les pires désastres survenus au cours du demi-siècle écoulé. Il reste plusieurs séries de chiffres sur la liste qui concernent des dates futures, et lorsqu'une catastrophe se produit juste sous ses yeux, il pense être capable d'empêcher les dernières...
Pour ceux qui craignent que Nicolas Cage soit en mode "MEGA ACTING",
rassurez-vous, dans ce film-ci il se retient sagement.
Difficile de parler du film sans trop en dévoiler et gâcher ce qui en fait le charme (et je suis tenté de conseiller aux amateurs du genre de le voir sans en lire plus), mais s'il commence effectivement comme un Roland Emmerich, Prémonitions parvient à sortir des sentiers battus pour devenir un film à part, qui casse le traditionnel schéma "l'humanité a été méchante avec Mère Nature alors plein de monuments célèbres sont détruits mais à la fin, on s'en sortira, on a bien retenu la leçon et le gentil papa se rapproche de ses enfants et se remet avec son ex-femme". On y retrouve bien quelques clichés du genre, comme la scène en classe où, évidemment, le cours du prof dure 5 minutes et a un rapport avec l'intrigue, ou encore la discussion avec un personnage secondaire qui lui répond que, vraiment, en tant qu'ami, il aimerait le croire, mais tu te rends compte que cette théorie est complètement folle, John. Et puis le film dévie, pour oser des choses qu'on ne voit pas vraiment ailleurs.
"Bonjour, laissez-moi vous exposer vite fait de quoi va parler le film,
après vous pourrez aller suivre un autre cours de 5 minutes ailleurs."
Les premières scènes de destruction, par exemple, restent à relativement petite échelle et n'en paraissent que plus brutales, plus saisissantes. On est en plein dedans, on voit les gens mourir. C'est pas la Maison Blanche en plan d'ensemble qui explose dans une gerbe de feu et de débris sans montrer ce qui arrive à ses occupants. Le film ne prend pas de gants, on n'est pas là pour rigoler, il n'y aura pas de petit chien qui sort des décombres pour qu'on se dise que bon, finalement, ouf, tout va bien malgré tout. A la place, il y a des gens en flammes qui essaient de se sauver puis qui se retrouvent engloutis par une explosion, des gens broyés par une carcasse, et Nicolas Cage qui assiste à tout ça en se demandant si connaître la date et le lieu des catastrophes lui donne vraiment le pouvoir de les empêcher comme il l'espérait.
Si les chiffres ont dit que t'allais crever, c'est pas la peine de courir,
TU VAS CREVER, t'entends ?
Il n'y a pas non plus de message écolo convenu, et s'il y a un petit caractère religieux à tout ça, ce n'est pas l'habituel "sois un bon croyant et tout finira par s'arranger". L'ambiance est noire d'un bout à l'autre, pas de faire-valoir comique, pas de valeureux héros qui sauve la planète, juste un scientifique qui a du mal à se réconcilier avec le fait que l'hypothèse du déterminisme universel soit finalement la bonne et que la théorie du chaos et le libre arbitre peuvent aller se faire bien enculer. Du coup, ça reste une couillonnade hollywoodienne basée sur une idée invraisemblable, mais qui prend un peu le contre-pied des autres au lieu de patauger paresseusement dans les lieux communs.
Sans faire partie de ces enfants-acteurs têtes-à-claques,
le gamin ne joue malheureusement pas très bien.
Car pour idiote que soit cette histoire de chiffres qui prédisent l'avenir, tout comme ce qui vient se greffer dessus (je vous révèle pas le truc, vous verrez vous-même), elle nous est racontée avec compétence et originalité, et à défaut d'y croire vraiment, on a quand même envie de savoir la suite, connaître le fin mot de tout ça, voir si l'apocalypse annoncée sur la jaquette va se terminer en pétard mouillé ou en terrible feu d'artifice. Alors forcément ça s'adresse plutôt aux fans de films catastrophes qu'aux amateurs de SF un peu plausible, mais dans son genre c'est largement meilleur que des navets comme Phénomènes, le remake du Jour où la Terre s'arrêta ou Légion, l'armée des anges. C'est un peu le chaînon manquant entre 2012 et Les Fils de l'Homme, entre Aux frontières du réel et La Quatrième Dimension, ce qui donne un résultat déroutant mais pas inintéressant.
Heureusement, la seule scène où les images de synthèse ne sont pas trop réussies
est celle du cauchemar ; dans celles où l'horreur se produit pour de bon, le rendu est plus crédible et réaliste.
Je ne vais pas vous le recommander sans réserve, en fait je n'irai même pas jusqu'à dire que c'est un bon film. C'est une curiosité, une grosse production hollywoodienne à effets spéciaux qui se permet le luxe de ne pas fonctionner tout à fait pareil que ses concurrentes dans ce domaine, mais partage certaines de leurs tares ; du coup, si ce n'est pas votre tasse de thé, il n'est pas garanti que vous accrocherez. Si en revanche vous ne rechignez pas à consommer de la série B rocambolesque, le mélange d'anticipation à grand spectacle et de thriller horrifique devrait pouvoir vous séduire. Pas forcément un film à posséder en DVD quand même, mais au moins à voir.