Je sais pas ce que vous en pensez (vu que vous ne dites jamais rien) mais moi je trouve que jusqu'à présent, il est pas trop désespérant, ce petit mois thématique. Ca change un peu des enchaînements de films pourris. Enfin je dis pas que je vous ai déniché une liste ininterrompue de chefs-d'oeuvre mais en dehors de trucs comme Donkey Punch y a pas trop de merdes quand même. Hostel III, Maniac, Frontière(s), hein ? Pas trop mal tout ça. Mais bon, je sens que vous êtes exigeants, alors aujourd'hui j'ai encore mieux. Vous êtes gâtés.
La fameuse Femme du titre provient d'un autre film, Offspring, tiré d'un roman du même scénariste (Jack Ketchum). Mais The Woman se suffit à lui-même, pas besoin de voir ce premier épisode pour apprécier. Par contre c'est le genre de film sur lequel je pense qu'il vaut mieux ne pas savoir grand'chose avant de le regarder. Désolé je sais que ça fait un peu "voilà mon excuse bidon pour bâcler cette critique en trois paragraphes" mais je voudrais vraiment pas vous gâcher le plaisir. Il faut dire aussi que ça n'est pas un film qui suit un schéma typique de film d'horreur, genre le tueur masqué, les jeunes qui sont punis pour s'être amusés, le monstre démoniaque, les animaux qui mangent les gens, les zombies qui attaquent, les fantômes qui claquent les portes, tout ça. En soi, s'éloigner des recettes habituelles ne suffit pas à faire un bon film, mais c'est quand même généralemnt bon signe quand un réalisateur essaie de faire autre chose que de copier Massacre à la tronçonneuse ou Les Dents de la mer.
Pour ceux qui veulent un petit mot sur l'intrigue quand même, c'est l'histoire d'une famille de bourgeois propres sur eux qui séquestrent une jeune femme sauvage que le père a capturée en forêt, sous prétexte de la "civiliser". Mais c'est vraiment qu'un prétexte, parce qu'elle ne parle pas leur langue et essaie de les bouffer dès qu'ils la détachent, ce qui ne facilite pas trop l'apprentissage de quoi que ce soit. Alors ils se contentent de la garder enfermée comme un animal féroce. Un animal féroce que les hommes de la famille auraient envie de baiser. Ce qui, évidemment, ne va pas sans causer quelques tensions à la maison, jusqu'à ce que tout parte en sucette de façon spectaculaire.
L'Ecossaise Pollyanna McIntosh reprend le rôle qu'elle incarnait déjà dans Offspring,
une cannibale aux allures de méchant de Rahan.
Ca aurait pu en faire des caisses sur des thèmes usés comme "oh la la, regardez comment sous cette apparence lisse de famille américaine modèle, ces gens sont des tarés", ou "mais alors, se pourrait-il que finalement les vraies personnes non-civilisées dans cette histoire ne soient pas celles qu'on pense ?" Mais ça aurait été un peu convenu tout ça, non ? Au lieu de ça, le ton rappelle un peu The Human Centipede, de l'horreur extrême mais avec beaucoup d'humour noir, et un protagoniste complètement malade derrière ses manières affables, qui inflige à ses victimes des tortures psychologiques et physiques atroces comme si tout ça était parfaitement normal. Mais alors que Human Centipede était malheureusement un peu creux, un peu "gratuit", The Woman a quand même quelque chose à lire entre les lignes, une deuxième couche à l'intérieur. Si on veut surintellectualiser le truc on peut dire que c'est sur cette obsession bien humaine de vouloir convertir l'Autre à notre vision du monde, notre système de valeurs, si arbitraires et contradictoires soient-elles, et sur le besoin masculin de s'approprier, de "dompter" la femme, parce que l'imaginer libre et autosuffisante est insupportable à certains hommes.
Les gags visuels font partie des petites choses qui rendent The Woman si affreusement drôle,
comme ici avec le père qui porte des gants en caoutchouc rose à fleur pour effectuer ses basses besognes.
Les acteurs sont excellents, à commencer évidemment par Pollyanna McIntosh (Cadavres à la pelle) en sauvageonne et Sean Bridgers (Deadwood) en patriarche tyrannique. La première a le physique et le langage corporel parfaits pour ce rôle sans dialogue de créature animale, brutale, étrangement désirable malgré la boue partout, les dents pourries, la démarche d'homme des cavernes. Le second campe un genre de Will Ferrell pervers, évite l'ecueil de la jouer façon savant fou ou tortionnaire sadique ricanant, pour une attitude plus subtile de brave papa sévère mais juste. Les autres acteurs ne sont pas en reste, pas même la petite fille, et pourtant à cet âge-là les enfants ont tendance soit à jouer complètement faux, soit à être de sacrées têtes-à-claques, soit les deux.
La qualité du casting est l'un des gros points forts du film.
J'ai un peu l'impression d'essayer de vous vendre le film avec ce qu'il n'est pas plutôt qu'avec ses qualités intrinsèques, mais comme j'ai dit, je pense qu'il vaut mieux se laisser surprendre. Sachez juste qu'il vaut mieux avoir le coeur bien accroché quand même (c'est pas hyper sanglant tout le temps, mais y a quelques moments bien affreux, vers la fin c'est même l'escalade), apprécier l'humour tordu et pince-sans-rire, et être prêt à se laisser embarquer dans une histoire bizarre, déroutante. C'est vraiment l'un des meilleurs films d'horreur que j'aie pu voir récemment, mais je connais aussi des gens qui ont détesté donc voilà, vous êtes prévenus. Ca se trouve dans les opérations "4 pour 20€", si vous êtes curieux ça vaut largement le coup de tester.