La Maison des 1000 morts était raté mais pas inintéressant. The Devil's Rejects était presque réussi et montrait que le réalisateur Rob Zombie était capable de s'améliorer, de ne pas persévérer bêtement dans l'erreur sous prétexte que c'est son style à lui. Du coup je me disais que même si son troisième long métrage n'était qu'un bête remake, il y avait une petite chance pour qu'il parvienne à élever la chose au-dessus de ce que font les incapables qui travaillent pour Platinum Dunes, la boîte de Michael Bay.
Je dois dire que, parmi les grands classiques de l'horreur, Halloween est celui qui m'a toujours le moins intéressé. Mais bon, c'est sûrement une bonne chose parce que ça m'a évité d'avoir constamment à penser que l'original était vachement mieux, puisque je n'en avais que de très vagues et lointains souvenirs quand j'ai regardé cette remise à zéro. Juste qu'il y avait un type muet en masque blanc et combinaison qui poignardait les gens sans relâche et sans raison apparente. Le projet de ce remake est d'ailleurs justement de donner une raison à tout ça. Raconter les origines du personnage pour nous expliquer que non, ça n'est pas un petit garçon qui s'est retrouvé comme possédé par le mal à l'état pur, juste un être humain normal dont les crimes ont un traumatisme de jeunesse pour origine. J'avoue que cette tendance "humanisons le monstre, dans le fond n'est-il pas qu'un pauvre petit garçon incompris ?" qu'on retrouve dans des merdouilles comme Beowulf et Grendel me paraît être une sacrée mauvaise idée à la base, mais bon. Au moins, l'ambition n'était pas simplement de reproduire, avec une esthétique moderne, quelque chose qui existait déjà, comme ça a été le cas pour Massacre à la tronçonneuse et Vendredi 13, mais de tenter une nouvelle approche. Alors même si c'est une approche idiote, je suppose que ça vaut mieux que rien.
Evidemment, qui dit horreur moderne dit que tout doit être cracra et abimé
pour faire plus chic et branché, et le masque blanc n'échappe pas à la règle.
Cet Halloween-là s'ouvre donc sur l'enfance de Michael Myers dans l'une de ces familles "white trash" de cauchemar comme vous en avez déjà vues dans ouatmille films. Papa n'est plus là, Maman est strip-teaseuse, Beau-Papa est un alcoolo lubrique et fainéant, Soeurette est une grosse traînée et au milieu de tout ça, le fiston est un pauvre souffre-douleur qui se fait chier sur la tête par tout le monde aussi bien à la maison qu'à l'école. J'ai beau imaginer, je vois pas comment ça aurait pu faire plus cliché que ça. Je sais pas s'il y a une école de cinéma qui dispense depuis des années un cours sur le thème "Dépeindre les pauvres à l'écran" mais en tout cas, il faut qu'il prenne sa retraite maintenant, parce qu'on commence à l'avoir beaucoup vue, cette famille-type, et qu'elle ressemble un peu trop à une grosse caricature pour être tout à fait plausible.
Tous les psys vous le diront, derrière chaque serial killer, il y a un William Forsythe
qui glande, boit et rêve de se taper la fille adolescente de sa copine danseuse seins nus.
Enfin bref. Petit, Michael Myers est malheureux. Au lieu de faire comme Haley Joel Osment dans Un Monde meilleur, qui a exactement la même enfance mais décide qu'il va faire le bien autour de lui, Michael tue des animaux, puis un camarade de classe. Et puis le soir d'Halloween, comme sa soeur préfère rester à la maison se faire tringler plutôt que de l'emmener faire la tournée du quartier pour réclamer des bonbecs, il décide de poignarder tout le monde. Ce qui lui vaut un séjour prolongé à l'asile psychiatrique où le docteur Loomis, ici joué par Malcolm McDowell, tente de le comprendre et le soigner, mais sans succès, alors Michael tue du personnel médical et s'évade et il retourne dans sa ville natale parce que sa petite soeur qu'il adorait parce qu'elle n'était qu'un bébé innocent quand il a tué les autres y habite toujours et il tue encore d'autres gens et le Dr Loomis le traque et on ne sait pas trop s'il veut tuer sa soeur ou être pote avec elle ou quoi et à la fin il meurt, ou bien est-ce que non ? Je veux pas vous niquer le suspense mais bon, il y a eu un Halloween II l'année dernière et il était sur l'affiche.
C'est l'ex-catcheur Tyler Mane qui incarne le tueur au masque de William Shatner, et
un vieux fan de la WWE pensera immanquablement à des personnages comme le Kane original ou Mankind
en le voyant évoluer au sanatorium avec sa dégaine imposante, son maque et ses cheveux longs.
Je peux comprendre ce qui séduit les scénaristes et réalisateurs dans le fait de faire toutes ces "redémarrages" de séries connues. D'un coup, un personnage mondialement connu, une icône de l'horreur est à vous. C'est vous qui choisissez pourquoi elle existe et pourquoi elle fait ce qu'elle fait. Vous effacez des décennies d'histoire avec ce que vous voulez. Wes Craven ou John Carpenter peuvent aller se faire enculer, leurs créations deviennent vos marionnettes. Vous pouvez ainsi imposer des choix audacieux et lourds de sens : Jason a un masque de hockey parce qu'il en ramasse un par terre, Freddy a un pull rayé parce que c'est ce qu'il portait le jour où il est mort. Des trucs de ouf comme ça. Rob Zombie, donc, décide que Michael Myers est grosso modo une version simili-réaliste de Jason Voorhees : c'est un gros colosse de quasiment 2m10, qui tue des jeunes qui baisent parce que quand il était petit il a souffert du fait que la personne chargée de s'occuper de lui l'ait négligé pour niquer. Et il a beau consacrer la moitié du film à expliquer ça, ça n'est pas franchement très intéressant ni convaincant. Avoir grandi dans une famille difficile, c'est un peu léger (pour ne pas dire complètement con) comme révélation sur ce qui change un petit garçon en impitoyable machine à tuer.
La première apparition du célèbre masque se révèle tout aussi inintéressante que celle
du masque de Jason dans le Vendredi 13 de Marcus Nispel.
C'est bien là le gros boulet que se traîne le film en fait. Il essaie de faire intelligent et réaliste mais se montre finalement aussi simpliste et incohérent que n'importe quel mauvais film d'horreur. Cet Halloween veut le beurre et l'argent du beurre, il veut qu'on le trouve intelligent parce qu'il prétend explorer la psychologie de son monstre, et à côté de ça on est censé excuser des trucs complètement crétins parce que "bah c'est un film d'horreur, faut pas trop réfléchir". Genre la famille Myers est une affreuse bande de loqueteux vivotant sur des pourboires de strip teaseuse, et ils habitent une ville qui apparaît clairement comme le "suburbia" ricain typique pour petits bourgeois. Enfant, Michael tue un camarade de classe dont la disparition ne suscite apparemment aucun émoi puisque le soir d'Halloween, les gosses se baladent en ville comme si de rien n'était. Adulte, il n'a pas vu sa soeur depuis qu'elle était bébé, elle est devenue ado et a changé de nom mais il la retrouve et la reconnaît immédiatement.
Les rares fois où le film a une idée vaguement intéressante, comme le fait que le Dr Loomis
ait délaissé la thérapie de Michael Myers pour devenir célèbre en publiant un livre sur son cas,
il évite soigneusement de l'exploiter ou la piétine carrément.
Pour ne rien arranger, rien de ce qui pouvait faire le charme des précédentes réalisations de Rob Zombie ne se retrouve là-dedans. On est vraiment dans du film d'horreur fade et plan-plan, qui ne surprend jamais, si ce n'est par la quantité d'acteurs de The Devil's Rejects que le réalisateur a réussi à recaser ici. Y compris sa chère petite femme, dont le talent d'actrice ne dépasse pourtant toujours pas celui d'une ex-starlette porno reconvertie. C'est pas pour être méchant mais y a des catcheurs qui jouent mieux que ça, et s'il y a bien un élément de ses premiers films qu'il aurait mieux fait de ne pas importer ici, c'est Sheri Moon Zombie.
Robert Englund n'était sans doute pas disponible alors à la place c'est Brad "Chucky" Dourif
qui vient rejoindre les Danny Trejo, les Ken Foree, les Udo Kier dans ce all-star game du cinéma de genre.
Le film est trop long, et patauge du début à la fin dans les lieux communs. Entre la première partie et sa psychologie de bazar et la 2ème où s'enchaînent les meurtres de figurants n'ayant même pas eu le temps de prononcer cinq répliques avant de se faire poignarder, il n'y a vraiment pas grand chose à sauver. Allez, pour être gentil je dirai que le gamin qui joue le jeune Michael s'en tire honorablement, c'est pas le genre d'enfant acteur qu'on a envie de baffer. Et que le disque de bonus propose une fin alternative plus intéressante et originale que celle qui est incluse dans le film. Et que le DVD fait actuellement partie d'une opération "3 pour 15€", ce qui fait qu'il se retrouve pas cher. Mais ce ne sont en aucun cas des raisons suffisantes pour l'acheter.